Sandra et Uwe vivent en France depuis vingt ans. Tous les deux franco-allemands d’origine, ils connaissent aussi bien l’univers échangiste de l’un et l’autre côté du Rhin.

Le libertinage, c’est mieux en Allemagne ou en France ?

  • Uwe – Tout dépend de ce que l’on cherche. Nous, nous sommes assez soft dans notre approche de notre sexualité : nous ne pratiquons pas la pénétration hors du couple et nous n’allons coquiner qu’avec un couple à la fois.
  • Sandra – Les clubs français et allemands sont très différents les uns des autres. Mais il existe aussi des différences entre grandes villes et clubs à la campagne… Et des différences entre l’ancienne RDA et le reste de l’Allemagne.
  • Uwe – Je suis originaire de Berlin. Et je peux vous dire que la première fois que nous sommes allés dans un club berlinois, ça nous a fait un choc de voir le côté underground et un aspect hardcore très affiché, par rapport aux établissements que l’on connaissait en France, ou dans le Bade-Wurtemberg, la région de Sandra (NDLR : sud-ouest de l’Allemagne).

Qu’est-ce qui change ?

  • Sandra – D’abord, c’est le dress-code. En France, c’est assez limité : des tenues inspirées des prostituées pour les femmes, et très classiques pour les messieurs. Dans la plupart des grandes villes allemandes, c’est beaucoup plus recherché… On affiche des tenues fétichistes, SM ou carrément des déguisements, y compris pour les hommes : cowboy trash, jockstraps…
  • Uwe – La déco des clubs changent aussi beaucoup. En France, ça ressemble à l’idée qu’on se fait des anciennes maisons closes, plus un côté discothèque. A Berlin, et même dans le reste du pays, chaque club a son imagerie : maison champêtre ou usine, classe ou carrément BDSM, l’atmosphère de chaque club est très particulière.

Et du côté des pratiques sexuelles ?

  • Uwe – Je dirais que les Allemands sont plus ouverts. Mais aussi plus soft.

C’est-à-dire ?

  • Sandra – La grande majorité des libertins et libertines sont un peu comme nous : plutôt mélangistes, avec des pratiques assez tranquilles. Mais personne ne hurle au scandale en voyant des pratiques plus hardcore : nous avons assisté à des scènes sadomasochistes, à du fist-fucking en plein sur la piste de danse, et personne ne s’en offusque.
  • Uwe – Il n’y a pas non plus cette barrière aussi stricte entre hétéros et homosexuels. Dans ce club de Berlin, on croise des couples gays, des travestis et des transsexuels… Tout ce petit monde se mélange et fait la fête ensemble. Après, c’est sans doute plus compliqué de trouver des partenaires qui nous correspondent.

On pourrait croire que c’est plus facile, au contraire ?

  • Sandra – Non, car les libertins et libertines allemand(e)s prennent un malin plaisir à brouiller les pistes. Vous pouvez voir arriver un couple dont l’homme sera totalement travesti et totalement hétéro. Ou être dragué par une femme en tenue de dominatrice, mais qui se contente d’un mélangisme doux.
  • Uwe – C’est pareil pour les clubs. Nous sommes allés dans un établissement échangiste pas très loin de la frontière avec l’Alsace. Quasiment tout était décoré à la mode BDSM. Il y avait des croix de Saint-André, mais aussi des cages en fer forgé et des instruments de torture que je n’avais jamais vu avant. Mais, sauf preuve du contraire, c’était là surtout pour la décoration, pour donner une atmosphère aux lieux. En tout cas, nous n’avons vu personne se servir de ces trucs !

Vos meilleures expériences ont eu lieu en Allemagne ou en France ?

  • Sandra – Comme spectateurs, ça vaut vraiment le coup d’aller dans certains clubs berlinois. C’est trash, underground et surtout très inventif. Les Berlinois n’ont pas les mêmes complexes que les Parisiens par exemple. C’est toujours un spectacle. Mais comme libertins pratiquants, nous préférons la France, où les choses sont plus compartimentées. C’est plus facile de faire des rencontres sans avoir de mauvaises surprises, sans malentendus.
  • Uwe – Notre plus marquante expérience, nous l’avons faite en France. Un couple nous a entendu parler allemand. Ils ne savaient pas que nous étions bilingues. Ils nous ont dragué, en anglais, et nous les avons suivi dans un coin câlin. C’était amusant de les entendre parler de nous sans qu’ils sachent que nous les comprenions parfaitement.